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L'Equateur (2)

On irait au Sud...

Ottavalo est l'un des plus grand marché de grossiste pour tout ce qui à trait aux produits traditionnels et touristiques d'Amérique du Sud. On y trouve un choix impressionnant de bonnets et pantalons péruviens, boliviens et autres instruments de musiques, statuettes ou jeux d'échecs aux allures incas... et ce, à des prix défiants toute concurrence. Résultat, le tourisme par ici est très orienté business. On y croise une proportion assez élevée d'Etats-uniens venus chercher de quoi remplir leurs stocks. On y croise, et c'est un peu moins drôle, un nombre élevé d'Israéliens qui, ici comme à La Paz, négocient au plus bas prix des produits sud-américains afin de les exporter vers Israël où d'autres pays occidentaux. Je dis que c'est moins drôle d'y croiser les Israéliens car, depuis le début de mon voyage, j'ai remarqué que les comportements des jeunes Israéliens en voyage en Amérique du Sud n'encourageaient pas vraiment à la sympathie. Je sais que c'est une généralité et que ce n’est pas beau de faire des généralités, mais je n'ai malheureusement pas encore trouvé un groupe (ils voyagent généralement par groupe d'anciens appelés du contingent ayant fait leur service militaire ensemble) pour me démentir...

 

D'ailleurs, au cours d'une soirée, je me suis même embrouillé avec une israélienne que je trouvais pourtant plutôt sympa, en plus d'être assez mignonne et de jouer de la guitare. Il a suffi qu'elle me parle d'une fois où elle était en voyage aux Etats-Unis pour que ça parte en sucette. En effet, j'ai esquissé un sourire. Elle a alors insisté pour que je lui dise pourquoi je souriais. Au début j'ai refusé car je sentais que ça allait mal se passer (j'avais vu juste...). Finalement, devant son insistance, j'ai cédé. Je lui ai alors dit que je trouvé ça assez drôle qu'elle me parle de son voyage aux Etats-Unis car ça faisait un peu stéréotype, l'Israélienne qui part aux USA, rapport aux liens qui unissent ces deux pays et tout et tout... Que n'avais-je pas dis là ! Elle a commencé à me balancer l'anti-Israélisme des Français qui sont CONTRE Israël et POUR les Palestiniens, que ceci que cela, tous ses arguments sur le conflit qui oppose son pays au Monde Arabe. Je lui ai alors répondu que, bien que totalement non expert en la matière, je pensais que dans ce conflit, à la base, il y avait un agresseur et un agressé,  et que Israël était le premier. Evidemment, j'ai aussitôt ajouté que le terrorisme palestinien n'était pas la solution et qu'il fallait le condamner fermement, mais que je ne comprenais pas que les gens de la région ne puissent pas vivre en bonne entente dans un même pays, avec une place moins importante pour la Religion et plus importante pour l'humain. Elle a alors continué en dérapant vraiment cette fois-ci puisqu'elle m'a dépeint les palestiniens comme des êtres horribles qui étaient, selon ses paroles 'des animaux' et tous 'souhaitaient la mort de tous les israéliens'.

 

Ce qui m'a le plus choqué dans cette discussion, outre bien sûr les horreurs que cette fille d'une vingtaine d'année a proféré, c'est qu'elle avait l'air normale. Elle avait des goûts musicaux proches des miens (est-ce vraiment être normal...?), elle était souriante et, a priori sympa. Mais en fait, après cette discussion, j'ai réalisé qu'elle avait été soumise, probablement, durant son service militaire peut-être, ou son éducation familiale ou scolaire, que sais-je, à une sorte de lavage de cerveau. Et ça, c'est choquant et triste, parce que ça ne laisse rien augurer de bon pour l'avenir si les jeunes, a priori 'normaux' de ce pays pensent comme cela...

 

Bref, je ne m'éternise pas à Ottavalo et prends un bus pour Quito, la capitale.

 

Le problème de Quito, m'a-t-on dit, c'est que le centre historique est très dangereux et l'on s'y fait régulièrement agresser. Résultat, je ne prends pas mon appareil photo lorsque je vais visiter Quito Viejo, le quartier colonial, magnifiquement conservé, et inscrit au Patrimoine Mondial de l’UNESCO (s’il vous plaît !!!). C’est effectivement très beau et je regrette quand même l’absence de mon appareil photo. Tant pis…

 

Ensuite, clou du spectacle, je me rends au musée ‘La Mitad del Mundo’ (dédié à la ligne de l’Equateur qui passe juste là et qui, rappelons-nous en, donne son nom au pays) où j’en apprends de belles. En effet, il semblerait que le musée soit, en quelques sortes, une supercherie. Une des pièces du musée l’explique d’ailleurs très bien, photos à l’appui.

 

Voilà : au siècle des Lumières, vers les années 1790, les Français envoyèrent des scientifiques dans la région et décidèrent de calculer avec tous leurs appareils modernes le lieu exact où passe l’équateur. Les voyant arriver et calculer tout ça avec leurs outils compliqués, les paysans du coin leur disent que les Incas, il y a plusieurs centaines d’années, l’ont déjà calculé, et que, d’ailleurs, ils ont construit un petit monument de pierres en forme de demi-cercle dont le diamètre montre exactement où se trouve l’équateur. Ce monument se trouve sur une colline à quelques centaines de mètres de là. Les Français leur expliquent gentiment (ou pas…) que les Incas étaient bien gentils (ou pas…) mais qu’ils n’avaient pas tous les outils modernes et ne disposaient pas des dernières connaissances de la science et que, par conséquent, leur résultat à eux (Français) seraient forcément plus précis. Au final, les scientifiques de chez nous trouvèrent un ligne d’équateur pas très loin de celle trouvée par les Incas et matérialisée par ce petit monument sur la colline… Mais, surtout, cette ligne était parallèle à celle des Incas. Ces derniers n’étaient vraiment pas tombés loin. A peine 200 mètres… Et ce, sans tous les instruments de mesure modernes et les dernières connaissances de la Science dont disposaient les Français. 150 ans plus tard, lorsque les équatoriens décidèrent de construire un musée pour rendre hommage à cette ligne imaginaire qui traverse leur pays, ils utilisèrent, bien sûr, la ligne définie par les scientifiques Français à la fin du 18ème siècle. Eh bien, figurez-vous que, quelques décennies plus tard, lorsque l’on put utiliser les satellites pour affiner les mesures astronomiques et géographiques de la Terre, on s’aperçut que les Français avaient eu tout faux et que les Incas, avec leur petit mur sur la colline, avaient parfaitement et très exactement trouvé où passait l’équateur.

 

Résultat : aujourd’hui, le musée est construit au mauvais endroit et tous les touristes qui viennent se faire photographier avec un pied dans chaque hémisphère (de part et d’autre de la ligne jaune) le font pour rien… Ironie de l’Histoire, l’enceinte du musée officiel s’arrête juste à quelques mètres de la vraie ligne de l’équateur… mais ne l’englobe pas…

 

Des voisins, ayant réalisé que l’équateur passait par chez eux, ont ouvert un musée alternatif, non officiel, beaucoup plus sympa et moins cher. On peut vraiment y mettre un pied dans chaque hémisphère et l’on peut y faire tenir un œuf sur la tête d’un clou (rapport à la force d’attraction qui est, sur l’équateur, soi-disant, parfaitement équilibrée…). Mais, surtout, on peut y voir, et je l’ai vu de mes yeux vu, une expérience sur la force de Coriolis. Le gars verse de l’eau dans un lavabo monté sur roulette. Il se déplace 2m au sud de la ligne de l’équateur. Il enlève le bouchon, il laisse tomber quelques pétales de fleur, et l’on voit, grâce aux pétales, que l’eau tourne dans un sens. Il déplace ensuite le lavabo de 4 mètres vers le nord, soit 2 mètres au nord de l’équateur, il recommence l’opération, et cette fois-ci les pétales nous montrent que le tourbillon de l’eau qui s’écoule tourne dans l’autre sens. C’est juste INCROYABLE ! Si on me l’avait raconté, je n’y aurais pas cru, mais là, j’en ai été le témoin direct. Un grand souvenir !

Après cette sympathique visite, quitte Quito pour Latacunga, un peu plus au Sud. Latacunga se trouve au pied du Cotopaxi et sera mon point de départ pour aller voir la Laguna de Quillotoa et le village de Zumbahua ainsi que ses alentours. Après une première nuit sur place, je tends le pouce alors que je me balade et n'ai pas spécialement l’intention de faire du tourisme avant le jour suivant. La première camionnette, celle d’un couple germano-équatorien m’emmène à 16km de la fameuse laguna de Quillotoa. Quelle merveille ce lac ! Imaginez un lac au fond d'un cratère, à 3800 m, dont l'eau est vert clair lorsque le soleil s'y baigne. MAGNIFIQUE !

 

Ensuite, en redescendant sur Zumbahua, où se trouve mon hôtel, je pousse un peu plus loin avec le sympathique ingénieur des ponts et chaussées que j'ai rencontré le midi même, pour me retrouver dans un bled (lui aussi à 3800) : Tigua, qui est le village d'origine d'un type de peinture locale. J'ai toqué à la bonne porte et c'est la fille de l'inventeur de ce genre artistique qui m'a ouvert. Et je leur demande de peindre un petit truc sur ma guitare (comme je le fais dès que je le peux partout où je passe depuis Leticia...). Et le résultat est excellent. On peut dire que comme prélude à la journée suivante c’était pas mal.

 

Et donc, ce matin, au réveil, GRAND SOLEIL ! Je décide de retourner sur Latacunga pour voir si le Cotopaxi est dégagé et si je peux le photographier. Le Cotopaxi est le volcan en activité le plus haut du monde. Le Mont Fuji fait figure de fourmilière à côté... Il s'élève à 5897 m, et son sommet est recouvert de neiges éternelles. Les montagnes des Andes par ici sont plutôt vertes, rapport à l’humidité et au soleil, imaginez alors le spectacle... Dans beaucoup de guides ou de brochures on dit qu'il est majestueux, eh bien, tout antimonarchiste que je sois, je dois admettre qu'il n'y a pas meilleur adjectif pour le décrire. Bref, je le photographie dans les meilleures conditions possibles.

Ensuite, deuxième décision du jour, alors que j'ai prévu de rester dormir à Latacunga, je pars pour Baños après avoir vu (depuis Latacunga, a environ 50 km de distance) de la fumée sortir du Tungurahua, sur les pentes duquel Baños se trouve. Encore une fois, j'ai vu juste. Sur le chemin il faut faire étape à Ambato, qui se trouve au pied du Chimborazo, qui est la montagne la plus haute du   Monde. Là, vous vous dîtes qu'il a pété les plombs le Yoyo, car tout le monde sait bien que la montagne la plus haute du monde c'est le Mont Blanc (Allons enfants de la Patriiiiiiiiiiieeeeeeeeuuuuuuuu...), euh… pardon... l'Everest. Mais, en fait, c'est juste que, astronomiquement, comme le bonhomme du musée à la Mitad del Mundo (Ah, ça aussi il faudra  que je vous raconte) a dit, astronomiquement, en raison de la forme aplatie de la sphère terrestre à l’équateur on se trouve plus éloigné du centre de la terre que dans le reste du monde. Et donc, ce sommet du Chimborazo, avec ses petits 6310m au-dessus du niveau de la mer, proche de l'Equateur, est le point le plus éloigné du centre de la Terre, environ 3000 m plus haut (toujours astronomiquement parlant, bien sûr) que l’Everest, et seulement 3cm et demi plus haut que le Mont-Blanc (Ouf, l’honneur national est sauf !!!).

 

Bref je dis ça pour avoir quelque chose à répondre aux gens qui sont allés en Inde et au Népal et qui ne manqueront pas de me demander : « Mais, que diantre es-tu allé foutre en Equateur ? »

 

Bref, le Chimborazo aussi est dégagé et je suis évidemment ravi de pouvoir le contempler dans toute sa splendeur.

 

Ensuite, arrivé à Baños, je prends une chambre et me précipite au Mirador Santa-Machin (tous les miradors s'appellent ‘Santa bidule chouette’ ici) pour voir et photographier le Tungurahua en activité. Et là non plus, ça ne manque pas : 5 minutes après être arrivé en haut des 4523 marches (oui j'exagère, et alors ?!?), le volcan est dégagé et recommence à cracher ses cendres et autres fumées… C’est une première pour moi. Voir un volcan en activité, de si près, c’est juste fabuleux.

Donc, après Baños je descends sur Riobamba, jolie vue du Chimborazo, et jolie petite ville provinciale de l'Equateur. Je pars ensuite pour Alausi, toujours dans les montagnes, joli petit bourg d'où je me dirige vers Cuenca. Cuenca est une ville superbe. L’architecture coloniale y est très bien conservée et mise en valeur. Je me rends à un concert de groupes locaux à l'université de la ville, un repère de gauchistes, un peu comme Nanterre... J'y revois l'une des deux belges rencontrées à Puerto Lopez, et c'est bien sympa. La tête d'affiche du concert est un groupe de Quito fameux, dit-on, sur tout le continent : Les Jayacs. En tout cas c'est vraiment bien, de la musique andine contemporaine bien entraînante. Après 4 jours à Cuenca je repars vers Loja, puis vers la frontière péruvienne, à Macara qui est un endroit bien sympa également.

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